mardi 23 mars 2010

23 L'espoir.



EMMETT POV




Le jour se levait. Mais peu m’importait. Les autres dormaient tous à moitié. Même Edward avait capitulé. Lui et Bella étaient de chaque coté du lit de Matt. Seuls mon père et Carlisle étaient réveillés. Charlie et son putain de regard fermé. On avait l’impression que ça ne l’atteignait pas. Son attitude m’exaspérait, cette habitude qu’il avait d’enfouir son ressenti au fond de lui. Je détestais ce trait de caractère de mon père. Cette façon qu’il avait d’être impassible à tout ce qui l’entourait. Je lui aurais mis des baffes pour qu’il réagisse enfin. Je savais que le fait de se retrouver ici devait lui rappelait l’agonie de ma mère. Mais était-ce une raison?

Je me souviendrais toute ma vie de ce jour où elle nous avait quittés. C’était l’unique fois où j’avais vu mon père pleurer, et la dernière aussi. Depuis il était comme anesthésié. Charlie n’avait jamais été un grand démonstratif, sauf avec ma mère. Mais au moins on savait, on ressentait avec Bella qu’il nous aimait. Mais par la suite, il avait tout refoulé au plus profond de lui-même. Nous étions une famille d’handicapés des sentiments comme disait Rose. Ma Rose…Elle avait mis beaucoup de temps à briser la carapace que je m’étais forgé. Ne pas s’attacher pour ne pas souffrir. Pour Bella c’était pire, elle était tellement jeune quand maman était partie. Bien sur Esmè avait été là à chaque étape de sa vie. Mais c’était différent, elle ne pourrait jamais remplacer notre mère. Renée était une mère hors norme, espiègle, tête en l’air. Mais son amour pour nous avait toujours été inflexible, d’une dévotion incroyable avec nous et mon père. Si elle voyait notre famille à l’heure actuelle ça la tuerait une seconde fois.

Merde, c’était son petit-fils dans la chambre en soin intensif. Rien à foutre qu’il veuille se préserver. Bella avait besoin de sa famille, quoi qu’elle en dise ou qu’elle en pense. Certes elle avait Edward, mais son père restait son père et ça personne n’y pouvait rien. Ma mère me manquait réellement aujourd’hui, elle savait trouver les mots pour nous réconforter. C’était d’une injustice totale, mais je devais me faire une raison. Carlisle arriva avec un café qu’il me tendit, me sortant de mes introspections.

_ Ils sont pas terrible en général, mais ça fait quand même du bien.

_ Merci Carlisle. Je crois que je vais aller faire un tour dehors.

_ Ca te fera surement du bien, un peu d’air.

_ Ouais. Surtout que certaines choses ne changeront jamais. Grognai-je à l’encontre de mon père.

_ Emmett…

J’étais déjà dehors. Je respirai à plein poumon. J’avais besoin d’évacuer ma frustration. Mon impuissance, mon envie de secouer Charlie comme un prunier. Je buvais mon café tout en marchant dans la neige devant l’hôpital. Enfin je shootais dans la neige plutôt. J’étais en colère après le monde entier. J’avais la sensation que le sol s’ouvrait sous mes pieds. Quand Billy, Jacob et Leah arrivèrent. Jacob me donna une tape sur l’épaule, Leah m’enlaça et Billy, lui, me serra la main.

_ Comment va Matt? S’enquit Jacob.

_ J’en sais rien. Il est stable pour l’instant. Mais dans le coma. Les médecins ne se prononceront pas avant demain.

_ Demain. Souffla Leah.

_ Ouais, il a fait un arrêt Cardio machin truc, ils ont du le réanimer.

_ Ô mon dieu! S’horrifia Leah en plongeant dans les bras de Jacob.

_ Bella et Edward? Demanda Billy.

_ Edward est assez maître de ses émotions. Mais je suppose que c’est une façade. Il veut être fort pour Bella, je pense. Bella…elle est comment dire…Dévastée.
_ C’est difficile pour tout le monde. Acquiesça Billy.
_ J’en sais rien, surement. Mais qui peut savoir pour Char…

Billy avait les poings serré sur ses cuisses. Je crois que s’il avait pu se lever de son fauteuil roulant pour m’en coller une, il l’aurait fait.

_ Emmett! Crois-tu vraiment que Charlie ne soit pas soucieux de la situation???

_ Je sais pas vu qu’il ne réagit pas! Grinçai-je.

_ Tu connais ton père. Tu sais à quel point c’est compliqué pour lui de parler de ce qu’il ressent. Il adore Matt, et même s’il ne le montre pas clairement, tu sais que j’ai raison.

_ Peut-être. Mais ce petit bonhomme ronchon et aseptisé me tape sur le système. Y’en a marre. Il ne peut pas dire les choses, comme les êtres humains normaux, pour une fois? Ou au moins faire semblant.

_ Je vais essayer de lui parler. Expliqua Billy.

_ Mouais tu peux toujours essayer. Grognai-je.

Je shootai dans un tas de neige, à cause de mon agacement. J’étais au supplice, j’aurais voulu revenir en arrière. Avant que tout dérape, faire quelque chose pour éviter ce massacre. Mais non, je n’avais rien fait à part aggraver la situation. J’aurais du trouver une solution pour rapprocher ma famille. Même si j’en voulais profondément à Charlie pour avoir rejeter Bella. Il aurait fallu que j’insiste à l’époque auprès de mon père. Mais je n’avais rien fait, je m’étais contenté de ne pas prendre partie au début. Pourtant je les connaissais, je savais qu’ils s’éloigneraient de plus en plus. Pour en arriver là. J’étais fatigué de cette situation. J’aurais tout donné pour que tout ça ne soit pas arrivé. Matt dans le coma, Edward et Bella anéantis, et les autres si mal, et moi si inutile, je ne servais à rien. J’aurais fait n’importe quoi pour soulager la douleur de ma sœur et aider Matt à s’en sortir. Mais je n’avais aucun pouvoir sur rien. Je n’étais que spectateur de cette douleur.

CHARLIE POV

J’étais mal à l’aise. Je me sentais étranger dans ma propre famille. J’étais assurément coupable de cette situation. Mes yeux se portaient sur Bella, elle dormait effondrée sur Matt. Je ne savais pas faire ça, consoler, la prendre dans mes bras. J’en étais incapable. Pourtant j’étais moi aussi bouleversé, mais dans l’impossibilité de le montrer. Je passais pour un insensible, mais depuis la mort de Renée j’avais érigé un mur imprenable entre moi et mon ressenti extérieur. J’aurais voulu dire à Bella que c’était ma petite fille et que je l’aimais, que je m’étais trompé. Matt était la plus belle chose qui pouvait arriver après mes enfants. Je n’avais pas supporté qu’elle ait tant de responsabilités à son jeune âge. Elle ne devait pas apprendre la vie de cette façon. Etre soutien de famille à dix-huit ans dépassait toute logique. A l’époque mes mots et mes actes avaient dépassé ma pensée. Bella était partie préférant s’éloigner de moi, dire que de la voir s’en aller était la chose la plus facile que j’avais faite était une aberration. Mais ma fierté mal placée m’empêchait de faire le premier pas. Et Bella s’était éloignée de moi inexorablement.

Emmett avait bien essayé de me faire évoluer, mais j’étais trop têtu pour ne serait-ce que l’envisager. J’aimais Matt, plus que tout. Ce gosse était merveilleux, aussi intelligent et malin que sa mère. Mon fils ne manquait jamais de me l’amener à la maison quand ils étaient à Forks. La vérité était que j’étais un mauvais père, Carlisle et Esmè avaient veillé sur elle comme sur leur propre fille, et moi j’étais dans l’impossibilité de lui parler. Toute cette rancœur qu’elle avait accumulé contre moi…Comment lui en vouloir? Je l’avais cherché, pourtant elle me manquait. Il n’y avait pas un jour où je ne pensais pas à elle et à Matthew, les choses avaient été trop loin.

Sans parler des quolibets sur ma fille et son éducation. La grossesse de Bella à dix-sept ans avait donné du café à moudre à la populace de Forks pendant des années, et même encore maintenant. Je ne supportais pas cette méchanceté gratuite. C’était pas une mauvaise gosse. Je n’avais jamais eu à me plaindre d’elle et pour cause, elle était aussi renfermée que moi. A l’époque elle ne sortait pratiquement jamais, elle était plongée dans son mutisme. On avait l’impression qu’elle voulait faire le moins de bruit possible. Les seuls moments où on sentait qu’elle était heureuse, c’était quand elle voyait Alice et Edward.

Edward…à son évocation je ne pouvais pas empêcher mon corps de réagir. Mes poings se serraient automatiquement. Mon corps se tendait au maximum. Je me sentais trahi par lui. J’avais du mal à accepter qu’il fût si inconscient à l’époque. J’aurais pu m’en douter qu’il était le père de Matt, et en fait je me demandais si intérieurement je ne le savais pas déjà. Ils se ressemblaient vraiment tous les deux, entres les yeux et les cheveux. Je me souviendrai toute ma vie du jour où j’avais appris que Bella était enceinte et qu’elle s’était enfuie de la maison.

FLASH BACK

Bella était encore enfermée dans sa chambre, elle discutait avec Emmett au téléphone. Depuis trois mois je l’entendais pleurer toutes les nuits. Je l’avais même entendue hurler à plusieurs reprises. J’avais essayé de savoir ce qui se passait, mais elle avait refusé de me parler. Elle naviguait entre ses cours et sa chambre. Elle était malade comme un chien, régurgitant tripes et boyaux. Je voulais l’emmener chez le médecin, mais elle refusait en disant que c’était un virus et que ça allait passer. Mais je voyais bien qu’il n’y avait aucune amélioration. J’en avais marre de ce zombie. Bella n’avait jamais été très expansive en parole, mais la c’était trop. Je voulais obtenir une explication. Emmett était dans la confidence depuis peu, mais lui aussi n’avait rien voulu me dire. J’étais son père et j’avais le droit de savoir. Bien sur j’aurais pu écouter leur conversation, et ça me démangeait. Mais je ne l’avais pas fait. Elle devait passer le weekend chez Emmett et Rosalie, mais je devais comprendre ce qui était en train d’arriver.

_ Bells! Appelai-je en bas des escaliers.

_ Oui!

_ Si tu as fini, il faut que je te parle.

_ J’arrive.

Elle descendit les escaliers avec sa valise. Je la lui pris des mains, connaissant sa maladresse valait mieux pas tenter le diable. Elle avait toujours ce regard triste depuis son retour de Seattle, je supposais que c’était du au départ d’Edward. J’avais pas prévu Matt.

_ Tes affaires sont prêtes?

_ Oui, oui.

_ Tu vas visiter la fac?

_ Eu…Oui.

_ Je comprends pas, tu aurais pu aller en Ivy league, quand même.

_ Papa, je te l’ai déjà dit. Je préfère être près d’Emmett. C’est tout.

_ Mouais. Tu veux bien t’asseoir, il faut que je te parle.

Elle s’exécuta gentiment. Elle fuyait mon regard.

_ J’aimerais savoir ce qu’il y a Bells. Des mois que tu ne sors plus.

_ J’ai pas envie c’est tout!

Elle m’énervait.

_ Ne me prends pas pour un con! Je ne suis pas aveugle, je sais qu’il se passe quelque chose!! Maintenant tu vas me dire quoi!
_ Tu ne sais rien! J’ai pas envie d’en parler! Emmett va arriver alors laisse moi tranquille!

Elle allait pour se lever, mais je l’avais retenue par le bras.

_Ô non mademoiselle! Tu m’expliques maintenant!

_ Tu veux quoi à la fin?? Tu veux savoir et bien tu sauras! Mais pose tes fesses sur le canapé!

_ J’ai pas besoin je t’écoute!!

_ Je suis enceinte! Satisfait!?

J’avais du mal comprendre.

_ Que…quoi…comment…je…toi…hein?

_ Oui ENCEINTE!

_ Comment tu…

_ Tu veux un dessin peut-être?

Elle se détacha de ma poigne et fit des allers retours dans le salon.

_ Non…mais…je…j’ignorai que enfin tu vois…un copain! C’est qui?

_ J’en ai pas cherche pas!

_ Comment alors?

_ Merde papa, on a pas besoin d’être avec quelqu’un « officiellement » pour avoir un bébé. Si?

_ Putain Bella! Tu n’a que dix-sept ans! Qui t’a fait ça?

_ Personne!!

_ Bah voyons t’es la vierge Marie? Ca ne te ressemble pas de faire ce genre de truc idiot!!

_ Merci papa, c’est tout à fait ce que je voulais entendre! Grogna-t-elle.

_ Tu as vu un docteur?

_ Oui.

_ A Forks?

_ Non Seattle.

_ T’as rendez vous dans une clinique?

_ Non. Pourquoi faire? Demanda-t-elle sur la défensive.

_ Pour…tu sais bien…t’es trop jeune…et…

_ QUOI??? TU VEUX QUE JE M’EN DEBARRASSE??

Elle avait hurlé, et s’était reculée contre la porte. Elle avait posé ses mains sur son ventre. Je détestais cette situation. Bella était enceinte, je sentais la colère m’envahir. Elle était trop jeune.

_ Bella! Tu dois vivre ta vie et c’est pas avec cette…cette chose que tu y arriveras. Ton diplôme, tes études.

_ RIEN A FOUTRE! C’EST MON BEBE ET JE T’INTERDIS DE PENSER CA!

Mon sang ne fit qu’un tour.

_ ISABELLA MARY SWAN! TU ES MINEURE ET TU ES MA FILLE! TU FERAS CE QUE JE TE DIS DE FAIRE!

_ JE SUIS TA FILLE??? SEULEMENT QUAND CA T’ARRANGE CHARLIE!

Je la giflais violement. C’était la première fois, je ne l’avais jamais toucher. Je regrettais mon geste aussitôt que j’avais senti ma main sur sa joue. Les yeux de ma fille s’embuaient de larmes. Je savais que j’avais dépassé une certaine limite

_ TU N’AS PAS A ME PARLER SUR CE TON!! JE SUIS TON PÈRE!

_ JE TE TRAITERAI EN PÈRE, QUAND TU TE COMPORTERAS COMME TEL! Cria-t-elle d’une voix enrouée par les larmes.

_ Tu vas faire ce que je te dis. Je refuse que tu gâches ta vie pour ça!

_ JAMAIS! JE M’ENFUIERAI A L’AUTRE BOUT DU PAYS, S’IL LE FAUT! J’SUIS PAS UN DE TES ADJOINTS! JE TE DETESTE!!

Emmett arrivait. Bella se précipita dans ses bras. Il savait, bien sur qu’il savait.

_ Wow wow wow. Du calme Bella. Il se passe quoi ici? Demanda-t-il à mon intention.

_ Il se passe que ta sœur est ENCEINTE! Mais je suppose que tu l’savais. Répondis-je plein d’amertume.

_ En effet, je le sais.

_ Et tu ne dis rien, elle va foutre sa vie en l’air et t’en as rien à faire!! Et bien sur tu sais qui EST responsable de ce gâchis!!

_ J’en sais rien de qui il est. Mais c’est le choix de Bella. Alors je l’aiderai du mieux que je peux.

_ COMMENT PEUX-TU TENIR UN DISCOURS PAREIL! ELLE N’A QUE DIX-SEPT ANS!

_ Oui peut-être. Mais elle est très mature et si tu n’étais pas plongé dans ton job tu l’verrais.

_ Pour ses études?

_ Je vais continuer par correspondance. Je n’y retournerai que pour mon examen. Expliqua-t-elle en essuyant ses larmes. Je veux vivre avec toi à Seattle Em. Je veux pu rester là. Emmènes moi s’il te plait.

_ Ok viens.

_ BELLA SI TU PASSES CETTE PORTE, TU NE POURRAS PLUS JAMAIS REVENIR! JE N’AURAIS PLUS DE FILLE

_ J’m’en fou! Tu peux aller bosser autant que tu veux. Je n’ai plus de père depuis des années. Couina-t-elle.

Je croisai le regard de mon fils, ses yeux étaient plein de reproche et de colère. Il accompagna sa sœur en larme jusqu’à sa voiture et revint.

_ Comment peux-tu lui faire ça?? Cracha t’il. Elle a besoin de soutien et toi tu l’enfonces encore plus. Te rends-tu compte de ce que tu viens de faire? Tu vas la perdre Charlie. A moins que se soit déjà fait!

_ Ta sœur n’est pas apte à prendre une décision comme celle-ci.

_ Qu’en sais-tu? Faudrait pour ça que tu fasses partie de notre vie! Bella va vivre avec moi, et je serais toi je ne ferais rien contre ça. A moins que tu veuilles qu’elle s’enfuie seule.

_ Je ne te comprends pas Em. C’est ta sœur, elle est jeune. Essayes de la raisonner.

_ Ce que tu ne comprends pas c’est que c’est SON choix. Je ne peux rien contre ça. Je peux juste la soutenir et l’aider. Rose m’aidera. Elle attendait de toi un peu de soutien et tu n’as penser qu’à te débarrasser de son bébé. Tu t’attendais à quoi comme réaction? De toute manière il est trop tard.

Emmett avait la main sur la poignée de la porte. Il allait partir.

_ De toute façon tu n’as jamais fait attention à ce qu’elle pouvait éprouver. Après la mort de maman, c’est comme si on n’existait plus. Alors ça ne devrait pas te changer beaucoup. Marmonna-t-il plus pour lui.

Je venais d’ouvrir les yeux et le réveil était brutal. Emmett avait raison, j’aurais du être plus attentif aux besoins et aux attentes de mes enfants. Mais j’en étais incapable. Je m’étais enfermé dans ma souffrance. Je m’étais éloigné d’eux, jusqu’à en oublier leur bien être.

FIN DU FLASH BACK

J’avais donc perdu Bella ce jour là. Nous n’avions plus jamais discuté. Bien sur Emmett m’amenait Matt quand il était à Forks. Mais ma petite fille me manquait, et j’étais incapable de faire le premier pas.

Quand Edward m’avait appelé la dernière fois, dire que j’avais été surpris était un euphémisme. Je ne savais même pas qu’il était revenu. Il voulait simplement venir me voir avec Bella. J’avais trouvé ça curieux surtout que Bella ait envie de me parler. Mais quand elle m’avait annoncé qu’Edward était le père de Matt, j’avais vu rouge. Je le croyais responsable de ma situation avec Bella. Il était le déclencheur de toute cette folie, s’il n’avait pas profité de ma fille rien de tout cela ne serait arrivé, mais Matt non plus. Mais quand elle m’avait avoué qu’elle aimait Edward, je n’avais pas supporté. Elle ne voulait plus que je fasse parti de sa vie, alors qu’elle ouvrait grand ses bras à Edward, alors qu’il l’avait abandonnée. J’avais besoin de m’aérer, tellement l’ambiance était lourde.

Après avoir pris un café, j’allais pour sortir quand je croisai Billy.

_ Tu sors? Demanda-t-il.

_ Ouais. Besoin d’air.

_ j’t’accompagne.

Je poussais donc le fauteuil roulant de Billy jusqu’à l’extérieur du bâtiment. Emmett était là, mais dès qu’il me vit, il s’éclipsa vers l’hôpital.

_ Hum…Y’a d’l’ambiance chez les Swan! Rigola mon ami.

_ Mouais. Il m’en veut pour l’altercation avec Edward et Bella.

_ L’altercation? C’est comme ça que tu appelles ça toi? Tu lui as tapé dessus non?

_ Ouais je sais. Je voulais pas, mais…

_ T’as pas résisté. Tu veux un conseil entre ami? Tu déconnes Charlie. Que tu en veuilles à Edward on peut comprendre. Mais il est venu jusqu’à toi pour te parler. Ce gosse ne manque pas de courage. Il savait que tu le prendrais mal. Ils ont fait le premier pas vers toi et t’as réagi comme un vieux con, tu t’rends compte que tu t’es même mis à dos ton fils? Mais putain Charlie, réagis bon dieu! C’est ta famille, ton p’tit fils, ta fille et même si ça te fait pas plaisir ton gendre. Enfin c’est ce qui s’en rapproche le plus. Y a un gosse dans l’coma parce que des adultes n’ont pas été foutus de discuter! Ô mais oui, tu peux me regarder comme ça!! Tu sais que j’ai raison.

Je secouai la tête, bien sur qu’il avait raison

_ Mouais. Grognai-je.

_ C’est vrai quoi Bon dieu Charlie, c’était quand même pas compliqué d’écouter ce qu’ils avaient à te dire. J’sais pas, de faire un effort. Merde ils sont ensembles et Matt en est heureux. Edward est un bon gamin. Tu sais ça aussi, c’est le meilleur ami de ton fils. D’accord il a fait des conneries avant de partir. Mais c’est un homme maintenant, il a changé. Tu l’as vu cette nuit non? Alors fais un grand pas et donne leur une chance.

_ J’en sais rien. Je sais pas…

_ Charlie, tu n’as pas été toujours comme ça. Tu es hermétique à tous sentiments depuis que Renée est décédée. T’as fait des erreurs, mais il est jamais trop tard. Ca prendra du temps, ce n’est pas une faiblesse que de montrer ses sentiments.

_ Je sais pas faire ça.

_ Bah t’apprendras.

_ Ouais s’ils me pardonnent un jour.

_ Mais oui.

_ Dis moi tu fais psycho en même temps que Jacob?

_ Il me donne des cours. S’exclama Billy.

Tout ça c’était bien jolie, mais j’étais censé faire quoi? Débarquer au milieu et faire mon mea culpa? Non j’en étais tout bonnement incapable. Je rongeais mon frein, j’étais incapable de faire quoi que ce soit. C’était tuant comme situation.

EDWARD POV

Je venais de me réveiller. J’étais ankylosé. J’avais encore fait un cauchemar, mais celui là était bien pire que les autres. Ca concernait Matt, et rien que d’y penser j’en avais la nausée. Je me levai et étirai mes membres. Je détendis mon cou. Il y avait un petit cabinet de toilette dans la chambre. J’observai mon visage dans la glace, j’y passai de l’eau. J’avais une barbe de trois jours et des yeux injectés de sang. Je posai mes deux mains sur le lavabo. Je baissai la tête et pensai à ce qui s’était passé il y a quelques heures avec mon père. J’avais vraiment besoin de relâcher la pression, et c’était dans ses bras que ça avait eu lieu.

Je retournai dans la chambre, Bella était en train de se réveiller. Je m’approchai et caressai ses cheveux du bout des doigts. Elle se redressa et s’engouffra dans mes bras. Les mots n’avaient pas lieu d’être pour le moment. Il n’y avait rien à dire. Notre douleur parlait d’elle-même. J’embrassai ses cheveux. Elle passa ses mains autour de ma taille et plongea sa tête dans mon pull. J’aurais voulu l’éloigner un peu de la chambre. Qu’elle boive un café. Sans compter que je savais que ma mère et Emmett voudraient surement voir Matt.

_ Bella?

Elle releva sa tête vers moi. Je me noyai dans un océan de chocolat. Mais ses yeux étaient rougis par les larmes.

_ Oui.

_ Si on allait boire un café?

Elle secoua la tête de gauche à droite.

_ Bella. Poursuivis-je. Je pense que ton frère aimerait venir le voir ainsi que ma mère.

Ca la frappa comme une évidence.

_ Ô…je…oui…bien sur. Mais…

_ On revient tout de suite après, je te le promets.

Elle hésitait. Je me défis de son emprise et lui pris la main. Elle embrassa Matt sur le front et daigna enfin me suivre. Je devais quand même la tirer. Nous passâmes la porte, je passai mon bras par-dessus ses épaules. Je fis un signe de tête à ma mère qui se précipita vers la chambre de Matt. Je cherchai des pièces dans mon pantalon. Je les trouvai, Bella semblait si éloignée de moi. Je lui tendis son café, elle me remercia d’un signe de tête. Il avait beau être mauvais ça faisait quand même du bien. Je relevai le menton de Bella avec mes doigts et posai mon front sur le sien. Puis j’embrassai le sommet de son crâne tendrement. Bella se tourna vers la grande horloge accrochée dans le couloir, quand elle y vit l’heure, elle soupira. Je trouvais moi aussi que le temps n’allait pas assez vite. Je m’adossai contre le mur buvant ma boisson, tandis que Bella faisait de même. Rose nous rejoignit. Elle se battait avec la machine pour obtenir un chocolat. Je l’aidai, ses mains tremblaient.

_ Comment va-t-il? Demanda Rose.

_ Pour l’instant il est stable. Répondis-je d’une voix terne.

_ C’est bon signe? S’enquit-elle les yeux plein d’espoir.

_ Oui.

_ Tu devrais rentrer Rosalie et te reposer un peu. Proposa Bella. Ce n’est pas bon pour toi de rester ici.

_ Je ne peux pas partir alors que…

Elle avait balancé son bras en direction de la chambre de Matt. Bien sur on pouvait la comprendre.

_ Bella a raison. Vous devez vous reposez toi et le bébé. Confirma Emmett.

Il enlaça ses grands bras autour du cou de Rose.

_ Je vais bien, et si je rentre je serais encore plus angoissée, donc de toute manière je ne dormirais pas! Stop et fin de la discussion!

Emmett leva les yeux au ciel, il rendait les armes. Les voir tous les deux me fit légèrement sourire. Emmett avala un gobelet de caféine.

_ Qui est avec Matt? S’angoissa Bella.

_ Ne t’inquiètes pas sœurette, il est avec Esmè et Carlisle.

_ Ok. Souffla ma belle.

Charlie se planta face à nous. L’ambiance était lourde, on pouvait voir Emmett se contenir de toutes ses forces. Bella avait ouvert la bouche de surprise, elle ne s’attendait pas à ce qu’il vienne jusqu’à nous.

_ Salut. Murmura Charlie.

_ Salut. Répondis-je.

_ Je voulais savoir si…si je pouvais voir Matt?

Grande première. Charlie avait été courtois, mais il était gêné. Comme nous tous du reste. Bella avait baissé les yeux. Avant de me regarder. Nous devions faire le second pas.

_ Bien sur. Acceptai-je.

Bella tourna ses yeux vers moi et capitula.

_ Oui. Chuchota-t-elle.

_ Merci.

Sur ce dernier mot, il tourna les talons vers la chambre de notre fils. C’était son petit-fils après tout. Il avait le droit d’être auprès de lui, sans compter que j’étais persuadé que si on en était là, c’était bien évidement dû à notre comportement à tous. Il était temps que chacun d’entre nous fasse des efforts.

_ Bonjour. Nous salua le docteur Ross.

Je sortis de mes pensées.

_ Bonjour. Répliqua Bella.

_J’aurais souhaité vous parler un instant

Je sentais Bella stresser d’un seul coup. Je passai mon bras par-dessus ses épaules.

_ Bien sur. Répondis-je pour nous deux en faisant un pas vers lui.

Je resserrai ma prise sur elle.

_ Voilà, en fait on s’est aperçu que Matt a trois côtes fêlés. Pour l’instant nous n’y toucherons pas. Il n’y a pas grand-chose à faire. Quand il se réveillera, on immobilisera ses côtes et on lui donnera des anti-inflammatoires et le temps fera le reste. Mais chez les enfants les os se ressoudent très vite. Nous rassura-t-il.

_ Et sinon son état? S’inquiéta Bella.

_ Son état général est stable. On le surveille de près. Il faut être patient. Expliqua-t-il en posant sa main sur mon épaule.

La patience n’avait jamais été mon fort, et pourtant c’est tout ce que nous avions. Pour ses côtes, nous savions que c’était du à la réanimation. J’observai Charlie par la vitre de la chambre de Matt. Il lui tenait la main, on avait l’impression qu’il lui parlait. Après tout, tout était possible. Peut-être qu’il avait décidé de changer. Ma belle semblait vraiment époustouflée par cette vision et à en croire le regard d’Emmett, elle n’était pas la seule. Esmè caressait les cheveux de Matt avec tendresse. Mon père vérifiait encore en douce ses constantes. J’admirai son calme et la détermination dans ses yeux, comme si un seul homme pouvait changer l’avenir.

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